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Au cours des négociations préalable à l’attribution de ce marché, le candidat propose, à l’appui de son offre finale, un rabais de 28 % par rapport à son offre initiale. Le marché lui est attribué sur la base de cette offre finale.
Toutefois, méconnaissant les obligations de contrôle mises à sa charge par les articles 18, 19 et 50 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, le comptable public procède au paiement des mandats adressés au titulaire du marché sur la base des prix de son offre initiale.
Il en résulte un préjudice de 981.382 € TTC pour la Commune.
Toutefois, alertée par un examen de gestion conduit par la Chambre régionale des comptes, la Commune régularise cette situation à la fin de l’exécution du marché en intégrant un reversement des sommes indument perçues par l’entreprise dans le cadre du décompte général et définitif du marché.
Le comptable public aurait pu penser, dans un premier temps, que cette régularisation faisait obstacle à la mise en jeu de sa responsabilité.
L’ancien régime de responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics permettait en effet au juge des comptes de prendre en considération les éléments postérieurs au manquement reproché pour qualifier l’existence d’un préjudice financier.
Le nouveau régime de responsabilité des gestionnaires publics constitue toutefois un régime répressif, dans le cadre duquel « les éléments objectifs indivisibles constitutifs d’une infraction s’apprécient au moment où les faits ont été commis nonobstant une éventuelle réparation intervenue avant le jugement de ladite infraction. Si le juge doit prendre en considération, lors du jugement, la circonstance tenant à la disparition ou à la réparation d’un préjudice, ce n’est pas en tant qu’élément constitutif de l’infraction, mais précisément comme élément de circonstance pour moduler la sanction. »
Dès lors, la juridiction financière n’a pu que constater que le comptable public avait bien commis un manquement à ses obligations en s’abstenant de procéder au contrôle des mandats de paiement émis par l’ordonnateur (Cour d’appel financière, 6 février 2025, Département de l’Eure, n° 2025-01).
Conformément à l’article L. 131-9 du Code des juridictions financières, la Chambre du contentieux de la Cour des comptes devait ensuite caractériser la gravité d’un tel manquement.
Le nombre de mandats de paiement irrégulièrement payés (à savoir 74) et le montant de « l’avance » ainsi versée au titulaire du marché a permis, sans difficulté, au juge financier de caractériser cette gravité.
Devait en outre être caractérisée l’existence d’un préjudice financier significatif pour la Commune.
Là encore, la régularisation des paiements indus aurait pu conduire à considérer que ce préjudice était inexistant.
Toutefois, la juridiction financière a retenu ici que ce trop perçu pouvait s’assimiler à une avance de trésorerie pour le titulaire du marché, alors que sur la même période, la Commune avait été contrainte de faire face à une capacité d’autofinancement insuffisante par le recours à l’emprunt.
L’ensemble de ces éléments a donc permis à la Chambre du contentieux de la Cour des comptes de considérer que le comptable public avait, par une infraction aux règles relatives à l’exécution des dépenses, commis une faute grave ayant causé un préjudice financier significatif à la Commune.
Une amende de 7500 € a par conséquent été prononcée à son encontre, le juge financier écartant toute demande de dispense de peine motivée par la surcharge de travail du comptable, l’imputabilité de l’erreur de facturation à l’ordonnateur et à la régularisation du trop-perçu, cette dernière démarche n’étant pas le fait du comptable poursuivi (mais du comptable lui ayant succédé, lequel n’a pas fait l’objet de poursuites).
Par cette décision, la Chambre du contentieux de la Cour des comptes fait par conséquent montre d’une grande sévérité qui pourrait apparaître contestable au regard de la régularisation des comptes entre les parties à ce marché. Elle illustre toutefois la métamorphose du régime de responsabilité des gestionnaires publics, lequel constitue désormais un régime répressif indépendant de toute question de réparation financière.