Cet article fait suite à la publication de l'article : Procédure administrative : le sort des délais, des procédures et du juge en période de covid-19 (27 mars 2020).
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Le sort des délais, des procédures et du juge administratif en période de covid-19… revu par l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020.
Cet article fait suite à la publication de l'article : Procédure administrative : le sort des délais, des procédures et du juge en période de covid-19 (27 mars 2020).
L’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 aménage et complète l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, ainsi que l'ordonnance n° 2020-305 du même jour portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
En liminaire, pour rappel, ces ordonnances du 25 mars 2020 prennent pour point d’appui la date de fin de l’état d’urgence sanitaire, actuellement fixée au 24 mai. Le rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020-427 confirme le caractère provisoire de cette date. Elle « méritera d’être réexaminée dans le cadre de mesures législatives de préparation et d’accompagnement de la fin du confinement ». L’objectif affiché serait, en l’avançant, d’ « accompagner, le cas échéant plus rapidement qu’il était initialement prévu, la reprise de l’activité économique et le retour aux règles de droit commun de computation des délais » précise le rapport.
Ainsi, l'article 1er complète la liste des délais, mesures et obligations exclus du champ d'application du titre Ier de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020. Relevons notamment, s’agissant de la matière administrative, que cet article :
L’article 2 de l’ordonnance n° 2020-427 complète l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306, aux termes duquel,
« Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois.
Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l'acquisition ou de la conservation d'un droit. »
Dans ce cadre, l’ordonnance du 15 avril précise :
« Le présent article n’est pas applicable aux délais de réflexion, de rétractation ou de renonciation prévus par la loi ou le règlement, ni aux délais prévus pour le remboursement de sommes d’argent en cas d’exercice de ces droits. »
Le rapport au Président de la République explique ces dispositions. On relèvera notamment que,
« L'article 2 de cette ordonnance ne constitue ni une suspension, ni une prorogation du délai initialement imparti pour agir. Le mécanisme mis en œuvre par cet article permet simplement de considérer que l'acte ou la formalité réalisé jusqu'à la fin du délai initial, calculé à compter de la fin de la période visée à l'article 1er (état d'urgence sanitaire + un mois), dans la limite de deux mois, sera réputé valablement fait. Il s'agit de permettre d'accomplir a posteriori (et comme si le délai avait été respecté) ce qu'il a été impossible de faire pendant la période d'urgence sanitaire augmentée un mois. (…)
Cet article 2 a un caractère interprétatif : il ne modifie pas la portée de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 mais explicite que depuis l'origine, celui-ci ne s'applique pas aux délais de réflexion et de rétractation. Dès lors, il a un caractère nécessairement rétroactif. »
L’article 3 de l’ordonnance n° 2020-427 précise l’interprétation du même article de l’ordonnance n° 2020-306 relatif à la prorogation des mesures administratives et juridictionnelles en cours. En substance, la prorogation n’est que supplétive : elle peut être adaptée en considération des intérêts en cause, par le juge ou l'autorité compétente.
L’article 4 modifie et complète les dispositions relatives aux astreintes et à l'application des clauses pénales, clauses résolutoires et clauses de déchéance.
Ainsi, l’article 5 réduit la durée de suspension des délais pour la consultation ou la participation du public. Ces délais sont suspendus jusqu'à l'expiration d'une période de sept jours suivant la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire alors qu'ils l'étaient par l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 jusqu’à la fin du mois suivant la fin de l’état d’urgence sanitaire.
L’article 6 complète l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-306 – celui-ci suspend les délais dans lesquels les personnes publiques et privées doivent réaliser des travaux et des contrôles ou se conformer à des prescriptions de toute nature – afin d’offrir une plus grande souplesse d’action à l’administration.
L'article 7 ajoute à l'article 9 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 deux nouveaux motifs qui permettront par décret de déterminer les actes, procédures ou obligations pour lesquels les délais reprennent, à savoir : la sauvegarde de l'emploi et de l'activité ainsi que la sécurisation des relations de travail et de la négociation collective.
Enfin le titre III de l’ordonnance réunit diverses dispositions
L'article 8 crée un titre II bis au sein de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 dédié aux enquêtes publiques et aux procédures en matière d'urbanisme et d'aménagement.
Afin de ne pas paralyser le secteur de la construction notamment, l’article 8 remplace, pour les recours contre les décisions de non-opposition à une déclaration préalable ou à un permis qui n’ont pas expiré avant le 12 mars, le mécanisme de l'article 2 par un système de suspension des délais. Ces délais de recours reprendront là où ils se sont arrêtés dès la cessation de l'état d'urgence sanitaire, sans être inférieurs à un minimum de sept jours pour permettre aux justiciables de saisir la juridiction.
Par ailleurs, les délais d'instruction des demandes d'autorisation et de certificats d'urbanisme et des déclarations préalables prévus par le livre IV du code de l'urbanisme, ainsi que des procédures de récolement, non encore expirés le 12 mars 2020, restent suspendus depuis cette date. Ils reprendront leurs cours à compter de la fin de l'état d'urgence sanitaire. Pour les délais d’instruction qui auraient dû commencer à courir après le 12 mars 2020, le point de départ sera la date de fin de l’état d’urgence sanitaire. Les mêmes règles s'appliquent aux délais impartis aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, aux services, autorités ou commissions, pour émettre un avis ou donner un accord dans le cadre de l'instruction de ces demandes ou déclarations. Le sort des procédures de préemption est également réglé par cet article (article 12 quater), dans des formes similaires. Enfin, l'article 12 quinquies prévoit que le cours des délais reprend pour les participations du public par voie électronique dans le cadre de la préparation et de l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
L’article 9 modifie les dispositions de l'article 15 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, lequel a prévu des règles de computation des délais de recours contentieux ouverts contre les décisions en matière d'éloignement et d'asile dérogatoires à celles fixées à l'article 2 de la même ordonnance.
Enfin l'article 10 précise les conditions d'application outre-mer de cette ordonnance.
L’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 aménage et complète les dispositions déjà complexes prises dans le cadre des ordonnances n° 2020-305 et 2020-306 du 25 mars 2020.
Elle tend en réalité pour l’essentiel à adapter les textes à une reprise plus rapide de l’activité économique. En outre elle répond à des impératifs de sécurité juridique en évitant par exemple que des délais de recours ne s’étirent trop dans le temps.
Quant au rapport au Président de la République relatif à cette ordonnance, il se veut didactique. Si son contenu est peut-être parfois un peu trop disert, l’ordonnance n° 2020-427 doit être lue à la lumière de celui-ci.