La Cour de cassation a tout d'abord rappelé que le lien de subordination était caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. La Cour ajoute que peut constituer un indice de subordination, le travail au sein d'un service organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution. Balayant d'un revers de main, un des principaux arguments développés par Uber qui consistait à avancer le fait que les chauffeurs étaient totalement indépendants dans leur organisation puisqu'ils pouvaient se connecter sur la plateforme et arrêter quand ils le souhaitaient, les Hauts Magistrats se sont appliqués à faire une analyse détaillée des conditions d'exécution de la prestation fournie. La requalification du contrat de partenariat en contrat de travail se base sur plusieurs critères : les chauffeurs ne sont pas libres de choisir leurs fournisseurs, la clientèle ne leur est pas propre, la fixation des tarifs est unilatérale, la plateforme leur impose un itinéraire particulier (à défaut, des corrections tarifaires sont appliquées) et les déconnexions temporaires à partir de trois refus de courses, relèvent du pouvoir de sanction.
La décision rendue par les hauts magistrats n'est pas une révolution au sens juridique et se situe plutôt dans le droit ligne de la jurisprudence actuelle. Mais les conséquences de cet arrêt interrogent : les magistrats ont-ils souhaité mettre fin au modèle économique Uber ? C'est assez probable. Les demandes de requalification en contrat de travail vont vraisemblablement augmenter, le risque de redressement Urssaf est évident outre le risque pénal (pour travail dissimulé). Le législateur avait pourtant accepté ce modèle économique en permettant aux travailleurs travaillant pour des plateformes de bénéficier d'un certain nombre de garanties en matière de prestations sociales. Pour sauver le modèle économique de type Uber, plusieurs solutions : soit le législateur s'empare réellement du sujet, soit les plateformes revoient leur modèle (tarification négociée, possibilité pour les chauffeurs de développer une clientèle personnelle, liberté de choisir la course et l'itinéraire, absence de sanction…). À défaut, il est à craindre que l'arrêt du 4 Mars 2020 signe la fin du modèle Uber.