Contrôles URSSAF : la Cour de cassation précise les limites du pouvoir des agents

Publié le 27 octobre 2023

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Droit social et de l'activité professionnelle

Dans un arrêt du 28 septembre 2023 (n°21-21.633), la Cour de cassation confirme son appréciation stricte des textes encadrant les opérations de contrôle, en distinguant droit d’audition des salariés de l’entreprise contrôlée et droit de communication de documents par ces mêmes salariés.

En cas de contrôle URSSAF, l’entreprise cotisante est tenue, conformément aux dispositions de l’article R.243-59 du Code de la sécurité sociale, de mettre à disposition des agents chargés du contrôle tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui lui sont demandés.

  • Quels documents les agents de contrôle peuvent-ils solliciter ?

Hors les bulletins de salaire, le Code de la sécurité sociale ne donne pas de précision sur la liste des « documents nécessaires à l’exercice du contrôle » dont la communication peut être sollicitée par les agents de contrôle.

La Charte du cotisant contrôlé fournit une liste indicative des documents susceptibles d’être demandés :

→ documents sociaux : déclaration sociale nominative, bordereaux de cotisations, déclarations de régularisation annuelle, bulletins de salaires, dossiers du personnel, contrats de travail…

→ documents comptables : bilans, grands livres comptables, balances comptables, fichier des écritures comptables…

→ documents fiscaux : liasses fiscales, avis d’imposition…

→ documents juridiques : statuts des sociétés, transactions, jugements de conseils de prud’hommes…

→ factures des sous-traitants et honoraires, ou factures émises par un travailleur indépendant justifiant de son chiffre d’affaires ou de ses recettes, justificatifs de frais (notes de restaurant, certificat d’immatriculation des véhicules…).

En tout état de cause, la lettre d’observations émise à l’issue du contrôle doit lister les documents consultés lors dudit contrôle.
 

  • A qui les agents de contrôle peuvent-ils s’adresser ?

S’agissant du droit à audition, l’article R.243-59 du Code de la sécurité sociale autorise les agents de contrôle à interroger les personnes rémunérées par l’employeur, quelle que soit la qualification des rémunérations qu'elles perçoivent.

La Cour de cassation veille à une application stricte de ce texte : le droit d’audition est limité aux personnes rémunérées directement par l’employeur, ce qui n’est pas le cas du responsable du service comptable d'une autre société du groupe, ou des personnes rémunérées par un prestataire de services de la personne contrôlée.

S’agissant du droit de communication, c’est exclusivement à l’employeur ou à son représentant légal que les agents de contrôle doivent s’adresser pour solliciter les documents nécessaires au contrôle.

Le contrôle et le redressement afférent doivent être annulés si les agents de contrôle s’adressent directement à l’expert-comptable de la société contrôlée pour obtenir des documents, à l'autorité organisatrice des transports (pour le contrôle de l’exonération du versement mobilité), ou encore à une société qui, bien qu'appartenant au même groupe que l'entreprise contrôlée, reste tiers au contrôle.

Les agents ne sont pas non plus autorisés à rechercher eux-mêmes les documents dont ils ont besoin et à procéder à leur saisie.
 

Dans l’arrêt du 28 septembre 2023, la Cour de cassation confirme l’attention qu’elle porte à la stricte application des règles encadrant le contrôle URSSAF.

  •  La position de l’URSSAF invalidée par la Cour de cassation

En l’espèce, l’URSSAF affirmait que ses agents pouvaient demander au salarié de l’entreprise contrôlée les documents nécessaires au bon déroulement du contrôle, sans avoir à s’assurer de l’existence en ce sens d’un mandat du chef d’entreprise. L’URSSAF arguait que le salarié n’est pas un tiers par rapport à l’employeur. Elle considérait également que l’autorisation donnée, par l’employeur, à son salarié, de communiquer les documents sollicités par ses agents pouvait résulter de l’absence d’opposition par l’employeur à ladite communication.

A tort.

La réponse de la Cour de cassation est sans ambiguïté : les opérations de contrôle sont irrégulières si l’inspecteur chargé du recouvrement demande à une salariée du service comptabilité de la société contrôlée de lui fournir un tableau portant sur la réduction générale de cotisations, données au vu desquelles le redressement est opéré, sans qu’il soit établi par l’URSSAF que cette salariée avait reçu autorisation de l’employeur de répondre à cette demande.

En outre, la Cour sanctionne le fait que ce tableau ne figurait pas dans la liste des documents consultés par l’inspecteur du recouvrement mentionnés dans la lettre d’observations.
 

  •  L’irrégularité des opérations de contrôle en cas de demande de document auprès d’un salarié, sans accord de l’employeur

Déjà, la Cour de cassation avait considéré irrégulière une procédure de contrôle au cours de laquelle les agents de l’URSSAF avaient, en l'absence du gérant et sans son accord, contraint l'un des préposés de la société à ouvrir une armoire ainsi que les tiroirs d'un bureau, et à leur remettre, sur leur demande pressante, des plannings s'y trouvant qu'ils avaient emportés pour examen.

La solution qui vient d’être dégagée par la Cour de cassation apparaît plus générale : dès lors que des documents ayant servi à établir le redressement ont été obtenus, sur demande des agents de l’URSSAF, auprès d’un salarié de l’entreprise contrôlée et sans accord de l’employeur, les opérations de contrôle sont irrégulières. Nul besoin de rapporter la preuve de pressions subies par le salarié.

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